Entretien avec Alfred Diban KI, Prêtre, étudiant et écrivain

Abbe Alfred Diban KI

Son amour ou sa passion pour la littérature amène l’Abbé Alfred Diban KI, au-delà de son ministère sacerdotal, vers le statut d’écrivain. Qui est-il réellement? Dans une interview qu’il a voulue nous accorder, il nous livre son parcours, sa vision de la jeunesse et de la société africaine. Lisez !!!

1. Présentez-vous svp?

Je suis un enfant de la Terre. J’appartiens à cette Terre-monde que le Créateur nous offre dans sa beauté. Alfred Diban KI, je participe de cette mondialité de par mon origine et aussi, à travers les nombreux liens de relations qui me font exister et devenir ce que je suis. De Toma (province du Nayala), je suis natif comme lieu de naissance à la vie, à l’humanité.

2. Parlez-nous de votre parcours?

‘Mon chemin de vie est classique. A l’enfance, j’ai été à l’école de la culture auprès de mes parents, de ma grand-mère et de mon entourage. C’était l’étape de l’éveil à soi et de la découverte de l’environnement social et politique. Elle a accompagné tout mon parcours scolaire dans une sorte de dialogue intérieur parfois en confrontation de sens. Après le lycée, j’ai choisi, en réponse à l’appel d’un sens de ma vie, un sens qui m’a été donné de discerner, de poursuivre l’idéal de l’Amour de Jésus-Christ d’une façon particulière. En cheminement vers le sacerdoce ministériel, des études de philosophie, de sciences humaines et de théologie, ont nourri en moi le goût de l’humain en marche vers son accomplissement total’.

‘Prêtre (ordonné en juillet 2007), je m’ordonne, autant que possible, à la Sagesse divine qui fait le monde. Pour participer de cette Sagesse, la première démarche est la méditation, ce moment fort où je m’ouvre à l’Eternité créatrice dans la contemplation de ce qui est et dans l’accueil de ce qui peut advenir. Je considère alors ma vie comme un service de coopération à ce que Dieu est et veut pour le monde’.

A Boromo (chef-lieu de la province des Balé), dans mon ministère (service), il m’a donné d’initier, avec le concours d’autres personnes, une association culturelle dénommée Gnidjan sèbèrè. Par la danse, des jeunes apprennent à s’organiser, à avoir une vision commune de sortir positif des situations de pauvretés. Contre le manque de moyens qui est un frein réel à développement humain et économique, la culture est un levier puisant. Il faut donc cultiver la culture !

‘Une autre association dont je suis membre fondateur est l’ACDI (Association Catholique pour le Développement Intégral). Dans le contexte précis de mon ministère à Boromo, l’ACDI a été un cadre de réflexions sur la société et d’actions multiformes de prises en mains de la construction d’un monde fondé sur l’alter-coopératif. C’est en unissant les forces de vie que l’on bâtit le monde meilleur’.

‘Je suis également membre de la Fondation Joseph KI-ZERBO pour l’histoire et le développement endogène. A l’ombre de ce baobab africain, Joseph KI-ZERBO, j’apprends à déconstruire les logiques guerrières qui ont enfermé des parties du monde dans des réductions inhumaines. L’homme est, ici et ailleurs, le même, à travers des traits distinctifs. Les différences ne diminuent pas son humanité’.

‘Actuellement, je poursuis un parcours d’études en mathématiques à l’Université de La Rochelle. Pour une recherche de l’interdisciplinarité, je suis en fin de Master à l’Université de Strasbourg en Sciences Humaines et Sociales’.

3. Depuis un certain temps vous vous êtes lancé dans la rédaction d’Œuvres littéraires, d’où tirez-vous cette inspiration? Qu’est-ce qui vous a motivé?

‘Ma rencontre avec la littérature vient des prix obtenus au GPNAL-SNC Bobo en 2004 (3ème prix ) et en 2012 (1er prix ). J’écris la vie. Les souffrances. Mais aussi les joies et les espérances. Ma source d’inspiration est l’histoire des oubliés du monde. Je parle des personnes dont les paroles ne comptent pas, ces hommes et femmes qui sont pris pour des instruments, exploités et manipulés. Je parle aussi des personnes-sources qui éveillent les consciences au prix cher de leur vie. Les oubliés du monde, ce sont aussi les forces de vie qui luttent en silence contre les puissances de destruction’.

‘J’écris pour dialoguer, pour entrer en communication avec tous et tout’.

4. Quels sont les livres déjà publiés et en cours?

‘J’ai publié :

- aux éditions L’Harmattan (Paris), Domolo et le canari magique (recueil de contes), L’oeil ouvert (Nouvelles) en 2016 ;

- Le monde change (recueil de contes) aux éditions Céprodif (Ouagadougou) en 2018 ;

- Le chemin de croix, un chemin de vie aux éditions Saint Augustin (Lomé) en 2019 ;

-En cours d’écriture, il y a un roman dont le titre provisoire est « le tourbillon »’.

5. Comment arrivez-vous à concilier votre vie de Prêtre et d’écrivain?

‘Ecrire, fait partie intégrante de ma mission de prêtre. L’écriture est une œuvre de reconnaissance de la beauté de la création. On pourrait dire que Dieu écrit le monde, Il le crée. L’écriture est une création, une « re-création ». Elle fait naître un chemin d’humanité tant elle est liée à la méditation. C’est ainsi que l’écriture n’est pas un extra de ma vie de prêtre. Elle est intérieure à ce que je suis et réalise en tant que prêtre’.

6. Vous êtes jeunes et vous avez été longtemps aux cotés de la jeunesse, quel regard portez-vous sur elle ? Peut-on compter sur elle ?

‘Je commence par dire ma joie d’être dans la jeunesse et de travailler avec la jeunesse. Elle est une traversée importante des âges. A cet effet, la jeunesse doit se connecter à l’histoire, celle des parents et des aînés et celle des autres. Il s’agit d’une connexion vivante pour tirer le meilleur de cette histoire. C’est le temps d’apprendre, pas seulement d’accumuler des connaissances, mais d’ouvrir son être aux possibilités infinies d’entreprendre, de poser les premières pierres de fondation de ce que l’on veut faire de sa vie et dans sa vie’.

‘La jeunesse est la fleur de la vie, de notre vie. Mais elle doit être une fleur qui se transforme en graine, capable de produire de nombreux fruits. C’est ce jeu dynamique de production de soi qui constitue la valeur (force physique et force psychique) de la jeunesse’.

‘Il me semble que l’outillage de la jeunesse par les politiques reposent bien souvent sur des projets à but économique. Important, j’en conviens. Mais l’essentiel se trouve au niveau du développement dans l’ordre de l’être’.

7. En tant qu’écrivain, que pensez-vous de nos sociétés africaines? Son évolution?

‘Les sociétés africaines se situent à un carrefour de complexité. Elles doivent faire le choix de prendre leur chemin propre sans se laisser posséder par des diktats extérieurs. De ce point de vue, la première chose à accomplir est le travail à faire sur elles-mêmes c’est-à-dire s’organiser, se penser, se projeter’.

‘Ensuite, il y a le vaste sentier de purifications et de transfigurations des modes de relations avec les autres sociétés. Quelles sont les liaisons qui captent les ressources humaines et les richesses de l’Afrique ? Une chose est d’identifier les causes de destruction, une autre chose est de prendre les mesures pour défendre la cause humaine. L’Afrique est à cette heure de passage d’un monde à un autre. Qu’elle se lève pour dire oui à la cause humaine’ !

Je vous remercie.

Entretien réalisé par Judicael Sawadogo et Achille Sawadogo, Avril 2019

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Mandela Washington Fellow, for Young African Leaders — Civic engagement — Development Cooperation, Economist, Project Management skills, Free learner

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Achille Sawadogo

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